Chronique d'Automne #2


C’est l’été Indien en Bourgogne, cette expression qui nous vient du Canada est plus connue que son nom local d’été de la Saint-Martin. Le temps tout doux et ensoleillé après les premières gelées d’automne et juste avant l’hiver apporte un peu de réconfort en ce premier week-end de confinement deuxième vague. Une fin octobre placée sous le signe des seules rencontres autorisées au pied des tombes.

Me revient en tête la célèbre chanson de Joe Dassin… « Tu sais, tu sais, je n’ai jamais été aussi heureux que ce matin là… ». Quelle joie de découvrir la nature se parer de mille couleurs, cette palette infinie propre à l’automne si subtilement mise en lumière par l’été indien. De quoi rivaliser avec les teintes plus commerciales des chrysanthèmes que les températures clémentes du moment laisseront rayonner pour quelques jours encore dans les cimetières de chaque village.

Pondichéry s’enveloppe, quant à elle, de chaleur humide propre à la période de mousson. C’est la fin de l’année scolaire à l’école de l’Ashram, première journée dans la vie d’une ex-étudiante, Sanhita, mon élève pendant 3 ans, s’apprête à s’envoler pour une nouvelle vie, de nouveaux horizons au son du piano et de son parfait accent français.

Ici, le loup hurle-t-il ? Ou hurle-t-on au loup?. Le troupeau de la ferme voisine vient d’être décimé avec une violence effarante, plus d’une dizaine de brebis, la nuit de la pleine lune : l'opportunité d'évoquer cette croyance populaire ancestrale selon laquelle la pleine lune aurait le pouvoir de transformer certains êtres humains en loup. La légende raconte que ces humains maudits (hommes et femmes) se transforment, à la nuit tombée, en créature anthropomorphe proche du loup. On parle de lycanthropie, le mot savant pour parler de ce phénomène.

Je me souviens encore le jour, en plein cœur de Pondichéry, de l’irruption dans la maison, directement devant le réfrigérateur, d’un imposant macaque rhésus, ouvrant la porte pour se servir goulûment du contenu. Cela arrive rarement, les fenêtres sont toujours grillagées et les portes scrupuleusement fermées. Cependant la règle comportementale est toujours la même : pas d’interactions avec l’animal. Lors de nos périples dans la campagne indienne, sur les sites touristiques particulièrement, mes hôtes ont toujours un peu de mal à comprendre comment gérer ces bêtes pour le moins mythiques. Comme avec le loup, notre relation avec les animaux censés être sauvages est quelquefois bien ambiguë.

Le loup apparaît, réindroduit en France depuis une trentaine d'années. En plein XVII siècle, Jean de la Fontaine s’inspirait des fabulistes de l’antiquité gréco-romaine et en particulier d’Esope, le père de la fable, pour nous livrer le célèbre “Loup et l’Agneau”. La Fontaine y dénonçait un rapport de force - la raison du plus fort est-elle toujours la meilleure? - Il s’agit aujourd’hui d’une bien intéressante métaphore qu’il convient de regarder sous l’angle de notre quotidien, de ses émergences et résistances.

Alors que Pondichéry reprend son rythme coloré - s’est-il vraiment arrêté ? -, dans ma retraite bourguignonne à Pringues, tous les jours sont comme un dimanche. Je n’avais pas réalisé combien la campagne et la ville sont si différentes quand chacun reste chez soi. Une redécouverte de l’espace ?

Une case de l'attestation de déplacement dérogatoire - déplacement pour motif impérieux- me permet de passer de bons et doux moments avec ma mère, nous allons même faire l’acquisition d’un agneau décoratif pour son petit jardin déjà rempli de belles pensées multicolores pour l’hiver.

Soudainement, il me manque les odeurs, celle du Jasmin, le soir au détour d’une rue de la ville blanche sur la TVS rouge. Et puis les fleurs de Frangipanier, elles représentent le dévouement et la dévotion dans la culture hindoue. Leurs subtiles formes et couleurs multiples me font visiter dans l’instant tous les endroits familiers de ma vie indienne, la signification donnée par la Mère est perfection psychologique.

Je n’ai toujours pas acheté mon billet de retour...

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