Parfum d'ubiquité...




Où es-tu ? me demande mon fidèle ami et correcteur Denis. Je pourrais répondre que je fais une expérience ubiquiste tant je me sens encore là-bas et aussi ici.

La mousson cévenole - comme on dit ici - contraste avec la chaleur étouffante de l'été pondichérien qui manque d’air et d’oxygène dans tous les sens du terme. Elle n'a d'égal avec la mousson indienne que la joie de la terre à se gorger des pluies si précieuses, à faire des réserves pour des temps plus difficiles et secs…

Un peu de prédictibilité dans ce monde devenu totalement imprévisible rassure. C’est sans compter les aléas du climat. Pondicherry s’asphyxie dans la chaleur du mois de mai, les quarante degrés dépassés sur le thermomètre donnent au nouveau confinement des airs de déjà vu et de je n’en peux plus.

Nul n’ignore la situation sanitaire actuelle en Inde, même si certains se croient encore légitimes pour discuter de l'état des lieux… Le nord de l’Inde, dans la tempête depuis avril, passe au sud de l’Inde le flambeau de la pandémie que rien ne semble arrêter. Pour la première fois depuis bien longtemps, les cas à Pondicherry ont doublé en quelques jours. Les nouvelles sont mauvaises, tout est sombre, me relatent mes amis et ma famille indienne. Depuis quelques jours, chacun est touché personnellement.  

Ce qui est clair, et non discutable, c’est que malgré les discours politiques pour soutenir l’économie, Pondicherry et le Tamil-Nadu ont retrouvé un calme incroyable et tellement inhabituel. Ces deux états n'échappent pas à l'arrêt de la vie grouillante indienne comme on l'a vu dans les États du Nord. C’est un confinement radical et total depuis lundi.

Les masques ont repris du service, même s'ils ne sont pas toujours bien placés, la différence était très nette lors de mon dernier tour en TVS rouge.

Les rues sont vides.
Ce soir, la police a violemment détruit le stand de bhaji - les beignets chauds et goûteux que l’on trouve à tous les coins de rue - de la dynamique épicière du 66 papamail koil street. Ceci en plus d’arrêter tous les passants de la rue qui trouvaient un peu de fraîcheur le soir devant les maisons le long des trottoirs.

Mon amie Bhawna m'écrit pour me dire qu’elle est contente et rassurée d’avoir reçu la deuxième dose du vaccin aujourd’hui et que dans notre cher Pondy, tout est très désert, bizarre et sec...Cette année, elle n’est pas rentrée chez elle à मोरनी (Morni) en Haryana.

Partir, c’est mourir un peu... Edmond Haraucourt, dans son poème : “Rondel de l’adieu”, commence par ce vers fameux célébrant que, quand on quitte un lieu, on n’appartient plus aux réalités de cet endroit.

C’est certainement pour cela que mes départs sont toujours pleins d'émotion, et celui-ci prévu initialement fin mai, particulièrement. 

J’ai décidé d’avancer mon départ pour deux raisons : être sûre de retrouver ma mère et l’arrivée prévisible de la vague coronale dans le sud de l’Inde ; son lot de restrictions déjà connues. C’est donc trois semaines plus tôt que prévu que j’ai refait le long trajet, neuf heures de route, pour rejoindre l’aéroport de Bangalore. En ce début de mois de mai les bougainvilliers sont à peine fleuris, le même voyage que l’année dernière au mois de juin ressemble cette fois à un départ précipité. Pourtant, ce qui était si exceptionnel il y a un an déjà, être rapatriée, devient presque une routine malgré son lot de tests, avant, après, et de documents à remplir en tous genres.

Trente-six heures tout de même… Que sont devenus les voyages depuis un an ? Devons-nous en faire une aventure des temps modernes à l’instar des grandes aventurières du siècle dernier ? Alexandra David-Neel et Ella Maillart, mes héroïnes de récit de voyage, m’invitent à garder les yeux grands ouverts sur ces mondes que j’ai la chance de traverser.

Quel regard avoir sur cette planète chahutée, sur ce monde qui se débat entre peurs, souffrances et émergences ?

Pour l’heure, je suis de retour en France, une période de transition, une quarantaine verte dans un silence presque oublié.

Dix jours sous haute protection de la sécurité civile et la visite quotidienne aimable et sympathique de la maréchaussée. L'Ardèche printanière m’offre ses paysages pour dix jours d'assignation à résidence.

Une transition qui réunit les mondes.

Les roses odorantes tout au long des chemins parcourus lors des strictes heures de sortie me transportent inévitablement au Laboratoire Senteurs. Deux heures par jour de liberté pour sentir les roses d’ici et être là-bas, forte de mes souvenirs olfactifs.
Me revient particulièrement l’odeur des petites roses, les jours où elles étaient effeuillées avec amour et conscience pour la distillation de l’eau florale dans le vieil et fidèle alambic.

Mes valises étaient bien remplies, telles des malles aux trésors pour rapporter un peu d’Inde à ceux qui en sont privés depuis plus d’un an maintenant.
Les visas de tourisme ne sont pas vraiment d’actualité.

Ma mère compte les jours, dans 5 jours je serai libérée, testée trois fois en deux semaines.                 

Que veut dire être libre en 2021 ?

Commentaires

  1. ... Oui, que signifie "être libre" en 2021 ? Est ce le fruit rare de notre travail spirituel ?
    Singulièrement, les lois deviennent féroces, plus encore que les virus ! Je ne crois pas à l'état providence...
    L'homme est sacrifié sur l'autel d'un mercantilisme "sanitaire".
    La liberté est de toujours dans la Force de l'Esprit. Mais pour vivre l'existence ne faudra t'il pas se soumettre à leurs propagande vaccinale ?

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  2. Etre libére en 2021 je pense, c'est etre libre en esprit mais confiné en physique, comme vous avez quittez l'inde mais votre souvenirs olfactif vous emène à l'inde.

    Enplus Etre libre en 2021, c'est réaliser que la vie est encore fragile et la future n'est pas ce qu'on imagine. Donc etre libre de tout les peurs et feter tout ce qu'on a, c'est savourer le présent, notre temps imprevisible dans ce monde.

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